29 sept. 2011

La valse des milliards

Je discutais hier avec un ami qui suit comme moi le blog Singularity Hub, nous parlions d’économie, des crises et de l’accélération des transactions quand il a lâché, comme ça, « on a peut-être atteint la singularité financière ».

Petit rappel pour ceux qui ne sont pas familier avec la singularité. Cette idée représente le moment à partir duquel les développements technologiques seront si importants et si rapide qu’il deviendra totalement impossible de faire des prédictions sur l’avenir. Qui aurait prévu il y a 10 ans seulement qu’Amazon, une petite librairie en ligne allait lancer une tablette tactile donnant accès à plus de 18 millions de titres (vidéo, musique et livres) pour aussi peu de 199$?

Mais revenons à nos moutons. Sommes-nous dans une situation de singularité économique? Les transactions et les principaux acteurs sont-ils devenus si gros que l’on ne peut plus rien prévoir?

Pour avoir une idée de ce qui se passe, je vous propose une valse des milliards. Des budgets, des chiffres d’affaires, des transactions comme autant d’élément à comparer pour avoir une image mentale, autant que possible, représentative de la réalité actuelle.

Alors, revenu moyen des ménages au Canada 78 500$. Ça c’est facile à imaginer. Le gros-lot de Loto-max est de 40 millions. 40 fois 1 million et 1 000 000, c’est déjà plus de 12 fois 78 500$ alors 40 millions c’est 480 fois le revenu moyen des ménages canadien!

Or le budget d’une petite ville de 186 000 habitants comme Sherbrooke c’est 233 millions de dollars – on est à 2 796 fois le revenu moyen des ménages canadiens. Continuons. Avec  le budget de la ville de Montréal on passe aux milliards, 4.5 milliards en 2011 soit près de 20 fois le budget de la ville de Sherbrooke.

Déjà ça commence à être flou. 4.5 milliards de dollars par an, 4 500 000 000. C’est de l’ordre de la population mondiale qui atteint ces jours-ci 7 milliards. Pour amasser 4.5 milliards de dollars, le ménage moyen canadien devra travailler plus de 57 000 ans!

Passons au niveau suivant : Le budget du Québec, 66 milliards près de 15 fois le budget de la ville de Montréal. Soit dit en passant les revenus prévus était de 62.2 milliards pour un déficit de 6%. Le budget du Canada? 276 milliards. Celui des États-Unis? 3 456 milliards pour des revenus de 2 162 milliards et un déficit abyssal de 37.5%!

Mais nous allons un peu vite. Qu’en est-il du privé? Quel est le chiffre d’affaire de Bombardier par exemple? 9.8 milliards en 2009. Air Canada? 11 milliards en 2008. Mais bon c’est de la petite bière Wal-Mart, première dans les revenus au monde, a publié un chiffre d’affaire de 405 milliards de dollars en 2010 – de quoi faire tourner la ville de Montréal pendant 90 ans!

Donc, Wal-Mart administre plus d’argent que le gouvernement Canadien. Ses décisions ont des effets directs sur plus d’un millions de travailleur et sur plusieurs millions de façon indirecte. Qu’en est-il des grands fonds mutuels – des fonds qui ne l’oublions pas servent principalement à financer de façon directe ou indirecte les grandes entreprises? Ils représentent donc un petite partie de ce que Wal-Mart dépense dans une année, mais sont au cœur de sa capacité à emprunté ou à éponger des dettes. Et bien, les 10 plus grands fonds mutuels avaient des actifs combinés de 797 milliards en 2011. Leur transaction concernent donc largement plus de gens que celle de Wal-Mart – on parle ici de dizaines de millions d’investisseurs et aussi de dizaines de millions d’emplois liés à ces investissement. Le poids de ces investisseurs est donc très important.

Les bourses où se transigent des actions d’entreprises jouent également un rôle très important. Les transactions qui y sont faites touchent encore plus de travailleurs et peuvent même donner le ton à l’économie globale. La capitalisation boursière (la valeur réelle des titres échangés) de la bourse de New York, la plus importante au monde est de 11 838 milliards, soit plus de 1 200 fois le chiffre d’affaire de Bombardier qui lui représente 124 000 fois le revenu moyen des ménages canadien – la seule bourse de New York représente donc 148 millions de ménages canadiens!

L’ensemble des 10 plus grandes places boursières au monde ont un poids en capitalisation de 33 309 milliards de dollars et elles ont une influence qui s’étend à l’ensemble des entreprises de la planète et des humains sur la terre.

Continuons avec quelques petits chiffres révélateurs. Les investissements outremer des 10 premiers pays investisseur : 13 591 milliards. La dette externe des 15 premiers « pays », y incluant les États-Unis et l’Union Européenne : 35 255 milliards de dollars, l’ensemble des divers pays de la planète doivent donc aux banques et à d’autres pays plus que la valeur totale des entreprises coté en bourse dans les dix plus grandes places boursières de la planète!

D’accord, la planète se doit plus que la valeur des entreprises. Doit-elle plus que son propre PIB? Non, le PIB planétaire est évalué à 65 610 milliards. C’est donc dire que les dettes externes des plus grands pays s’élève à plus de 50% du PIB mondiale! Et, le chiffre d’affaire de Wal-Mart représente 0.6% du PIB de la planète…

Reste les transactions à évaluer. C’est là que ça devient fou. Le volume de transaction inter-monétaire, communément appelé Forex (pour Foreing Exchange) qui représente les échanges de devises entre pays, entreprises et individus, les swap (échange de devise en factures) et les dépôts à terme en devise étrangère s’élève à 3 210 milliards de dollars par jours !!

Ces échanges s’élèvent donc annuellement à environ 1 million 107 mille 450 milliards de dollars. Je vous l’écris pour le plaisir : 1 107 450 000 000 000 $ Soit plus de 16 fois le PIB planétaire! Si on inclut toutes les transactions financières, forex, bourses, etc. le total s’élève à 2.2 millions de milliards par an!

Bien sûr pour plusieurs tout ça c’est normal, c’est l’économie en mouvement. Et, oui, les montants sont gigantesque, astronomique, mais il y a une multitude d’acteur et donc le marché ou du moins l’idée du marché est intacte. Mais je n’y crois qu’à moitié. Nous n’en sommes peut-être pas à la singularité, mais le poids des transactions, les montants impliqués, la portée de toutes ces transactions et surtout le fait que tout cela soit automatisé et que malgré la multitude d’acteurs certains de par leur décision peuvent déclencher des réactions en chaine me laisse croire qu’un moment de singularité n’est pas à exclure totalement.

.jpm

p.s. Je n’ai mis aucune référence, c’eut été trop lourd, mais la plus part de mes chiffres proviennent de page Wikipédia, du CIA Worldfact Book et de sites gouvernementaux.

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