1 nov. 2012

Mériter et légitimer

À la commission Charbonneau, Luc Leclerc, ingénieur à la retraite des travaux publics à la ville de Montréal, est venu témoigner et confirmer qu’il avait reçu plus d’un demi-million de dollars en pots-de-vin. De son propre aveu il a bien aimé ces petites attentions, surtout les cadeaux et les billets de hockey.

Mais la partie la plus intéressante de son témoignage est à mon avis cette déclaration à l’effet qu’il a « Beaucoup donné à la ville ».

Le gars a probablement travaillé fort, négocier des millions de dollars de contrats à chaque année, se levé aux petites heures régulièrement pour être sur le chantier à 6h00 quand les gars commencent, jongler avec des dossiers complexes même les fins de semaine…

Des patrons, des décideurs, des administrateurs, des directeurs qui se donnent à fond pour leur boulot, qui n’ont jamais vraiment de vacances, qui dînent en dix minutes entre deux réunions ils y en a beaucoup. Ils sont souvent bien rémunérés, trop bien diront certains qui ne connaissent peut-être pas vraiment le boulot.

Le problème apparait quand ces mêmes décideurs commencent à croire qu’ils méritent ce qu’ils ont et plus encore. La ligne est mince, c’est un état d’esprit particulier, nous le connaissons tous. C’est ce petit sentiment que nous le méritons bien puisque l’autre qui en fait autant, peut-être même moins, en profite lui aussi. Un dîner d’affaire qui n’en n’est pas vraiment un facturer à l’entreprise, « ça va compenser pour l’autre de la semaine passée que j’ai pris sur le pouce », des billets pour un match des Canadiens offerts par un client (un classique tout à fait légal dans le privé) va compenser pour ces quelques soirées passées au bureau à travailler sur un gros contrat…

Et bien sûr une fois que l’on a mis le doigt dans l’engrenage tout finit par se justifier, les réunions qui finissent tard, les retours à la maison à minuit après une journée à l’extérieur ne sont plus compris dans les émoluments de base de l’administrateur, ce sont les cadeaux qui les payent, puis les pots-de-vin peuvent bien apparaitre, ils vont compenser autre chose ou simplement égaliser le traitement de l’un et de l’autre parce que, bien sûr, on se compare. « Pourquoi lui et pas moi? »

Au finale les agissements des uns finissent par déteindre sur ceux des autres et tout le monde finit par plus ou moins participer au système, tout dépend au bout du compte de l’élasticité relative de l’éthique de tout un chacun.



Ici par exemple on ne prend pas de pause. J’ai pourtant droit à deux quinze minutes par tranche de trois heures travaillé et nous faisons huit heures par jour. Je peux donc considérer que j’ai droit à 40 minutes de pause par jour. Jeter un œil sur Facebook me prend entre 30 secondes et une minute je pourrais donc y aller près de 60 fois par jours sans considérer que je vole du temps à mon employeur… Ceci bien sûr, si je ne fais rien d’autre de personnel sur internet et si je n’ai aucune discussion de corridor dans la journée, mais tout le monde fait l’un et l’autre alors pourquoi me limiter?



 .jpm

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire